Aucune valeur légale
Au Québec, le contrat de mère porteuse avec ou sans rémunération n’a aucune valeur légale. Pourquoi? Principalement pour éviter que les enfants deviennent des objets de commerce et que le corps des femmes soit considéré comme une marchandise pouvant être mise au profit de la procréation.
Dans le cas cité précédemment, le juge en charge du procès a considéré que de permettre l’adoption reviendrait à faire preuve d’aveuglement volontaire en confirmant que la fin justifie les moyens. L’enfant n’a pas le droit à une mère à tout prix. De plus, la loi ne comporte pas de présomption de maternité. C’est donc dire que la femme qui accouche n’est pas présumée être la mère du bébé. Elle doit compléter un formulaire administratif du Directeur de l’État civil qui permet l’identification des parents biologiques de l’enfant. Dans les circonstances de l’affaire, madame n’a pas signé ce document. L’enfant a donc un père dont le nom apparaît sur l’acte de naissance, mais se retrouve sans mère.
L’adoption suite à la procréation assistée
Les couples qui ont recours à la procréation assistée vont généralement s’adresser au tribunal suite à la naissance de l’enfant pour tenter d’obtenir un jugement en adoption, et ainsi établir leur filiation à l’égard de l’enfant. Cela pose toutefois problème, car puisque comme le contrat de mère porteuse n’est pas légal, le tribunal considère que de permettre l’adoption dans de telles circonstances légaliserait indirectement un contrat autrement interdit de droit nul. De plus, le Code civil du Québec stipule que l’adoption est permise uniquement en respectant l’intérêt de l’enfant et les conditions prévues par la loi. Ces conditions incluraient notamment le contexte particulier du contrat de mère porteuse.
Permettre l’adoption dans de telles circonstances légaliserait indirectement un contrat autrement interdit. Néanmoins, il y a déjà eu certains cas particuliers où de telles requêtes en adoption ont été acceptées lorsque c’était nécessaire pour protéger l’intérêt d’un enfant et lui donner des droits découlant de la filiation.
Nullité du contrat même si les parties sont toutes d’accord
Cette décision de la Cour du Québec signifie que le contrat de mère porteuse
demeure nul même si toutes les parties y consentent. Bien que la loi prévoie la nullité absolue d’un tel contrat, elle ne prévoit pas les conséquences à l’égard de la filiation de l’enfant issu du contrat. Dans les faits, la conjointe du père agit comme une mère pour l’enfant, mais légalement elle n’a pas de droits ni de devoirs envers lui. Par exemple, elle ne peut pas consentir aux soins de santé de l’enfant. De plus, si le couple se sépare, elle n’aura pas de droit de garde ou de visite, n’étant pas la mère de l’enfant. Suite à une rupture, l’absence de lien de filiation maternelle peut également causer un préjudice à l’enfant. En effet, il ne pourra pas obtenir de pension alimentaire de madame, cette dernière n’étant pas reconnue comme sa mère.
Face à ce vide juridique, le Québec devrait réfléchir et trouver une solution dans l’intérêt des enfants et des personnes vulnérables. Cet enjeu de société fera couler encore beaucoup d’encre. Reste à voir si les décisions à venir en la matière iront dans la même direction que ce jugement.