Encore sous le coup de l’émotion, Benoit a trouvé le testament de sa grand-mère en effectuant du ménage dans ses affaires et il s’est rendu compte qu’il n’y est pas nommé comme héritier. Pourtant, il est orphelin, il n’a aucune famille proche, et à son avis, il devrait hériter. Sa grand-mère a décidé de tout léguer à des œuvres de charité! Fâché, Benoit décide de déchirer le testament et de le jeter aux poubelles. Il est certain qu’il s’agit de la seule copie qu’elle a rédigée à la main. Un voisin a trouvé le testament dans le recyclage et a porté plainte. Benoit a été déclaré indigne à succéder par le tribunal. Qu’est-ce que cela signifie?
Au Québec, une personne déclarée indigne ne peut hériter. La loi prévoit des situations où une personne est considérée indigne à succéder. Il peut soit s’agir de l’indignité de plein droit, soit d’une déclaration judiciaire d’indignité.
Indignité de plein droit
C’est une situation où le tribunal n’intervient pas. Dans ce cas, la personne est indigne si elle est :
- déclarée coupable d’avoir attenté à la vie du défunt;
- déchue de l’autorité parentale de son enfant, avec dispense pour celui-ci de l’obligation alimentaire à l’égard de la succession de cet enfant.
Pour le premier cas, on considère qu’il est évident qu’un meurtrier n’hérite pas de sa victime, situation que notre société ne tolèrera pas. Pour le deuxième cas, on estime qu’un parent déchu de son autorité parentale ne peut plus hériter de son enfant. Or, il existe une exception, soit lorsqu’il y a maintien de l’obligation alimentaire du parent auprès de son enfant, malgré la déchéance. Dans ce cas particulier, le parent conserve son droit de succession sur le patrimoine de l’enfant. . L’enfant peut toutefois hériter de son parent déchu.
Déclaration judiciaire d’Indignité
Dans ces cas, la décision de déclarer la personne comme indigne doit être prise par un tribunal. Ce sont les cas suivants :
- Celui qui a exercé des sévices sur le défunt ou a eu autrement envers lui un comportement hautement répréhensible;
- Celui qui a recelé, altéré ou détruit de mauvaise foi le testament du défunt;
- Celui qui a gêné le testateur dans la rédaction, la modification ou la révocation de son testament.
Dans ces trois dernières situations, le tribunal a précisé qu’il fallait que la personne ait agi frauduleusement. Par conséquent, ce n’est pas parce qu’une personne déchire une pile de papier quelconque en ne sachant pas qu’elle contient un testament olographe (écrit à la main), que le tribunal va la considérer comme étant indigne. Pour ce faire, il faut que la personne sache que la pile de papier contenait le testament olographe du défunt et que ce geste l’avantageait, comme dans le cas de Benoit.
Finalement, la loi prévoit qu’il est possible pour le testateur de pardonner à son héritier qui autrement serait considéré comme indigne. En effet, si le défunt connaissait de son vivant la cause d’indignité et n’a pas modifié son testament pour enlever tout avantage qu’il laisserait à celui qui aurait pu être déclaré indigne, la loi considérera cet héritier comme n’étant pas indigne. Dans notre exemple, étant donné que Benoit avait détruit le testament intentionnellement parce qu’il avait appris qu’il n’était pas l’héritier, et que cela a été prouvé, le tribunal est en mesure de le déclarer indigne d’hériter.