Comment définir la maltraitance envers les aînés?
Le Québec connaît une augmentation marquée de sa population âgée. En 2021, le nombre de personnes de 65 ans et plus s’élevait à 1,75 million, représentant 20 % de la population totale. En 1971, cette proportion était de seulement 7 %, et elle devrait atteindre 26 % d’ici 2041, selon les projections démographiques. Malgré cette croissance, la maltraitance envers les aînés demeure un phénomène peu connu et insuffisamment abordé.
En 2019, au Québec, environ 6 % des personnes de 65 ans et plus avaient subi au moins un type de maltraitance au cours des 12 derniers mois, soit environ 78 900 personnes. Parmi celles-ci, 4,6 % ont vécu de la maltraitance psychologique, la forme la plus répandue. De plus, 0,8 % ont été victimes de maltraitance matérielle ou financière, et une proportion similaire a subi de la maltraitance physique. Enfin, 0,4 % ont été victimes de négligence physique et 0,4 % de maltraitance sexuelle.
Le gouvernement du Québec, en s’inspirant de l’Organisation mondiale de la santé, définit la maltraitance envers les aînés comme un acte ou une omission qui survient dans le cadre d’une relation de confiance et qui cause détresse ou souffrance à la personne âgée. Cette maltraitance peut être ponctuelle ou répétée.
Selon le Ministère de la Famille, les formes les plus courantes de maltraitance incluent la négligence, la violence physique ou sexuelle, la maltraitance psychologique ou émotionnelle, l’exploitation financière ou matérielle et la violation des droits de la personne. Ces abus peuvent se manifester de plusieurs manières : absence de soins psychologiques et d’hygiène nécessaires, coups, alimentation forcée, attouchements sexuels, exhibitionnisme, humiliation, ignorance, infantilisation, menaces, insultes, fraude, pression pour obtenir de l’argent ou une part d’héritage, discrimination basée sur l’âge, traitements médicaux forcés sans consentement, etc.
L’auteur de la maltraitance
L’auteur des actes de maltraitance peut être un membre de la famille (frère, enfant, etc.), une personne de l’entourage (collègue, voisin, ami, etc.), le conjoint ou encore une personne prodiguant des soins. En 2019, environ un quart (25 %) des personnes âgées ayant subi de la maltraitance psychologique au cours des 12 derniers mois l’ont été de la part d’un conjoint ou d’un ex-conjoint. De même, pour près d’un quart (23 %) de ces personnes, l’auteur de la maltraitance était un enfant ou un bel-enfant. Les femmes de 65 ans et plus sont souvent victimes d’abus perpétrés par leur conjoint, tandis que les hommes du même âge subissent généralement des maltraitances de la part de leur entourage ou de leurs collègues.
Pour identifier les situations d’abus envers les aînés, l’organisme belge Réseau Internet Francophone Vieillir en Liberté (RIFVEL) a développé un test. Selon ce test, l’auteur de la maltraitance est souvent une personne dépourvue de moyens pour s’occuper de la victime. Cette personne peut être dépendante de la personne maltraitée, vivre avec elle ou s’occuper d’elle, avoir des problèmes de consommation de drogues ou d’alcool, ou encore faire face à des difficultés financières ou familiales.
Les indices courants indiquant la présence de maltraitance incluent l’ingérence dans les finances de la victime, des comportements rabaissants, insultants et menaçants, des accès de colère, l’isolement de la victime ou encore l’empêchement de recevoir les soins de santé nécessaires.
Comment reconnaître une personne victime de maltraitance?
La personne affectée par la maltraitance est souvent en perte d’autonomie, dépendant depuis longtemps de l’aide d’une même personne. Généralement, elle peut ne pas avoir le contrôle total de ses finances, avoir peu ou pas de contacts avec sa famille, ou souffrir de maladies mentales ou de handicaps physiques.
L’aîné maltraité présente fréquemment des signes de dépression tels qu’une perte de poids excessive, des pleurs fréquents, un isolement social, des pensées suicidaires et des troubles du sommeil. Parfois, cette personne peut rechercher l’approbation d’un tiers avant de répondre à des questions, indiquant une peur ou une dépendance. Les indices visibles de violence, les chutes fréquentes sans raison apparente et les comportements nerveux ou craintifs sont aussi des indicateurs courants de maltraitance. Par exemple, une personne maltraitée pourrait avoir tendance à éviter tout contact visuel, sembler terrifiée par certaines personnes, ou inventer des excuses pour expliquer ses blessures, telles que « je suis tombée » ou « je suis maladroite ».
Il est important de noter que ces signes ne sont pas exhaustifs. L’absence de certains indicateurs, comme une perte de poids ou une attitude craintive, ne signifie pas nécessairement qu’une personne n’est pas victime d’abus. Souvent, les signes de maltraitance peuvent être plus subtils ou bien dissimulés. C’est pourquoi il est crucial de rester vigilant et attentif aux changements de comportement ou aux indications plus discrètes de détresse.
Quoi faire en cas de maltraitance envers les aînés?
Afin de mieux comprendre ce problème de société, de le reconnaître et de savoir comment agir dans une telle situation, la section sur la maltraitance du site Internet du gouvernement du Québec aborde plusieurs aspects de cet enjeu.
De plus, la Ligne Aide Maltraitance Aînés offre de l’information, un service de gestion de crise et de suivi ainsi qu’un soutien psychologique. La victime, ou toute personne qui a des motifs raisonnables de croire qu’une personne âgée subit de la maltraitance, peut contacter cette ligne téléphonique au 1 888 489-2287.
Une personne peut aussi faire un signalement à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse et ce, même s’il est impossible d’obtenir le consentement écrit de la victime. Cette démarche pourrait éventuellement mener à l’ouverture d’un régime de protection aux biens ou à la personne. Un régime de protection permet de nommer une personne qui s’occupera des biens et s’assurera du bien-être de la personne devenue inapte. La personne désignée peut être un proche de la personne inapte ou l’État (Curateur publique) si aucune personne proche ne peut être nommée. Vous pouvez contacter la Commission par téléphone au 1 800 361-6477 ou par courriel au accueil@cdpdj.qc.ca
Il vous est aussi possible de porter plainte directement à la police.
Les intervenants psychosociaux qui travaillent dans les CLSC peuvent offrir un support à la victime et la diriger vers les ressources appropriées.
Enfin, la trousse SOS-Abus, s’adressant aux intervenants sociaux, aide ceux-ci à prévenir et à dépister les abus envers les ainés, à intervenir en situation d’abus envers les aînés et à former d’autres personnes sur le sujet. La trousse est disponible au www.troussesosabus.org.